La prochaine fois, je prendrai le bateau

Ou le train. Ou le bus. Ou la Batwing. Cet aller pour le Japon aura été mon trajet le plus calamiteux jusqu’à présent. J’y reviendrai.

La semaine qui a précédé le départ, j’ai eu la bonne idée d’attraper la sinusite du siècle – fièvre incluse, ce qui a passablement ralenti mon efficacité quant aux derniers préparatifs. Il n’y a jamais de bon moment pour tomber malade mais il y en a clairement des pires que d’autres.

J’ai quand même réussi tant bien que mal à faire quasiment tout ce que je devais.
Le dernier weekend avant le grand jour, j’ai été prise d’une vague d’inquiétude en deux étapes.

D’abord, la paranoïa : et si je ne trouve pas de travail ? Et si j’en trouve un mais que mon salaire est tellement misérable qu’il couvre à peine plus que les frais de transport qui eux, sont très élevés ? Et si j’arrive à court d’argent… ?

Puis, le doute : est-ce que je ne suis pas en train de gâcher une belle histoire avec un homme super au nom d’un vieux rêve qui n’est peut-être plus d’actualité ? Une vision du Japon fantasmée et déformée par le prisme de la nostalgie ?

Enfin, il n’était plus question de reculer et foncièrement, ce n’était pas ce que je voulais.
Je suis donc partie et arrivée difficilement à Tôkyô. Très difficilement.

Rien à voir avec mes états d’âme ceci dit (même si l’épisode des aux-revoir n’est jamais facile…) C’était difficile d’un point de vue logistique.

Le premier vol s’est bien passé, en dépit d’un peu de retard et du fait que j’ai failli m’étouffer en avalant ma propre salive de travers. Je me suis gentiment vue offrir un « Ztrepzil »par la mamie russe imperturbable assise à côté de moi. Nous avons atterri au crépuscule, profitant ainsi du spectacle des reflets rose-orangés du soleil couchant sur la neige d’Helsinki.

L’enchantement n’a pas duré : il a fallu se presser jusqu’à l’autre bout de l’aéroport pour avoir la correspondance. C’est donc en nage que j’ai atteint mon siège entre deux Japonais. En vain : nous avons décollé avec deux heures de retard car une des issues de secours ne se fermait pas correctement à cause du gel. Heureusement, mon voisin de droite, un météorologiste d’Okinawa était manifestement en veine de discuter.
Il venait de passer une semaine de vacances en Finlande pour observer les aurores boréales et se demandait si j’étais Finlandaise. Ma réponse n’a pas eu l’air de le décevoir puisque il était francophile et un peu francophone (à croire qu’ils le sont tous : sérieusement, je n’ai encore jamais rencontré de Japonais n’aimant pas la France – il doit pourtant bien y en avoir !) Nous avons discuté un peu des raisons de ma venue au Japon ainsi que d’autres choses et avons échangé nos coordonnées. Si, comme je l’espère, j’arrive à aller à Okinawa, je ne manquerai pas de le contacter.

Nous étions tranquillement en train de survoler la Russie quand le pilote, d’un ton hésitant qui n’est ABSOLUMENT pas rassurant vu sa fonction, nous a annoncé qu’il y avait un problème technique, apparemment une fuite, sur l’aile gauche, et que la meilleure option était de retourner à Helsinki et de voir une fois sur place si l’on repartait après réparation, si l’on changeait d’avion ou si l’on passait la nuit à l’hôtel en attendant le lendemain. (o_o)
Moi qui jusque alors n’avais jamais eu peur en avion, j’ai vraiment flippé. J’ai senti un frisson me parcourir l’échine et les battements de mon cœur s’accélérer. Je ne sais pas si ce genre de choses arrive régulièrement, je ne prends pas l’avion suffisamment souvent. Mais sur le coup, je n’en menais pas large. Et au lieu de penser à d’éventuels regrets dans ma vie où aux gens que j’aimais, j’ai commencé à me poser des questions incongrues : est-ce que le personnel navigant mange les plateaux repas de l’avion tous les jours ? Et si oui, ces gens sont-ils en bonne santé, physique et mentale ? Les obèses peuvent-ils prendre l’avion en classe économique ? Est-ce que la raison pour laquelle on ne peut pas boire l’eau du robinet dans les toilettes c’est parce qu’il s’agit d’eau recyclée et que si tout le monde la buvait, on ne pourrait plus tirer la chasse ?

De retour à Helsinki, les techniciens ont résolu le problème et nous avons pu repartir avec le même appareil. Je n’étais pas spécialement rassurée mais j’avais envie d’en finir, d’arriver une bonne fois pour toutes. C’était reparti pour 9h de vol. (-_-)
Heureusement qu’il n’était pas prévu que l’on vienne me chercher à l’aéroport, je n’avais aucun moyen de prévenir qui que ce soit.

Comme d’habitude, impossible de dormir vraiment dans l’avion. J’ai somnolé, tout au plus. J’étais vaseuse, mon reste de sinusite me filait mal au crâne, j’avais les membres inférieurs endoloris, une petite fille braillait par intermittence (et honnêtement, on ne pouvait pas lui en vouloir vu les circonstances) et j’avais une tenace envie de fumer.
J’ai essayé d’écouter un peu de musique pour me détendre mais le choix proposé dans l’avion était assez restreint et j’ai vite compris qu’écouter de la pop finlandaise aboutirait certainement à une crise d’épilepsie.

C’est donc à 17h au lieu de 10h, heure locale, que l’avion a fini par se poser à Narita.
J’ai souhaité bon courage à Yasunori-san, mon compagnon de galère, pour qui le voyage continuait jusqu’à Okinawa. Je bénis les Japonais pour l’efficacité de leur organisation ! Une fois au sol, tout a été très rapide : on m’a orientée vers le bureau de l’immigration pour valider mon visa, au bout de cinq minutes on me remettait ma carte de résidente temporaire, j’ai pu récupérer mes bagages sans attendre, passer les douanes sans encombre, il n’y avait plus qu’à gagner Tôkyô.

L’aéroport de Narita se situe dans la préfecture de Chiba, à environ une soixantaine de kilomètres de la capitale. Ce n’est pas rien. J’avais initialement prévu d’emprunter un train lambda qui prendrait pas mal de temps et ne coûterait pas très cher pour arriver jusqu’à Tôkyô, mais épuisée par mon voyage, j’ai cédé à l’appel de la navette Narita Express qui m’y a conduite en seulement une heure mais pour 2800 ¥.

De là, il n’y en avait plus que pour une petite demi-heure de métro et une dizaine de minutes de marche pour arriver à destination. J’avais faim, soif, envie de faire pipi, j’étais fatiguée, je me sentais sale, et c’est dans cet état que j’ai fini par arriver chez mon amie Lo, dans l’arrondissement de Nakano, après 27h de voyage porte à porte…

7 commentaires sur “La prochaine fois, je prendrai le bateau

  1. Bonjour ma chère Camille,
    Et bien que de péripéties pour ton aller… j’aime bien ton style et j’avais l’impression de voyager avec toi…
    Bon j’espère que tu t’es bien remise de tes émotions et que tu as pu manger, boire et dormir chez ton amie
    A plus pour de nouvelle aventures…
    Bisous et à bientôt
    Patricia d’Arjo

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  2. I hate flying….. there is not one single piece of that aircraft that would not fall straight to the ground if thrown off…. it is still a wonder how the whole thing can stay in the air… were it humanly possible… I would rather walk
    – Airplane meals have significantly improved over the past 10 years
    – The pilot and co-pilot are not permitted to have the same meal
    – Obese travelers continue to have difficulties travelling, and the incidents are regularly recorded in the news

    A fun read…though I imagine living it was much less fun. Keep your chin up !!

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  3. Au moins tu te souviendras de ce trip. Les commentaires recus de la Reine Mere avant-hier valaient, leur pesant de cacahuetes. En particulier ceux ayant trait a la pissee de kerosene! Dans le genre: « Parlez moi d’avion et j’vous fous mon poing sur la gueule » pour paraphraser Brassens. 🙂

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